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Message à celles et ceux qui relativisent l’homophobie et la transphobie du pape

A vous qui ne ménagez pas vos efforts pour nous convaincre que les propos du pape du 26/08/18 et qui vouent à la psychiatrisation les enfants perçu-es comme homosexuel-les ne sont pas homophobes, nous avons des choses à vous dire :

– Vous produisez l’historique des propos ‘progressistes’ du pape (« Qui suis-je pour juger… », etc.) pour nous convaincre de sa sincérité. Nous n’oublions pas qu’il y a un T dans LGBTI, celui de Trans. En février 2015, le pape avait condamné les personnes trans « pour ne pas reconnaître l’ordre naturel » et les avait comparées à des bombes atomiques. Est-ce un message d’amour ‘progressiste’, pour vous ? Pourquoi « oublier » de tels propos dans vos historiques ?  N’oublions pas qu’il y a 10 jours encore, une agression coûtait la vie à une femme trans, Vanesa Campos, et qu’on recense depuis 2008, 2609 victimes de meurtres transphobes.

– Tout à votre historique, vous oubliez  le passé très récent. Quelques heures avant les propos que vous jugez bienveillants à l’égard des enfants homosexuel-les, le pape s’affichait avec le cardinal Barbarin. Ce soutien de la Manif pour tous est un opposant à l’égalité des droits qui s’est illustré par des propos à la violence homophobe la plus crasse, où il comparait homosexualité, polygamie et inceste. C’est aussi une personne mise en examen pour avoir caché des agressions sexuelles de prêtres sur des enfants. Quand on s’affiche avec un homophobe complice de pédophiles, est-on crédible quand on prétend vouloir le bien-être des enfants homosexuel-les le lendemain ? Surtout quand un autre prêtre vous accuse d’avoir caché des faits de pédophilie ?

– Quitte à faire un historique de la « bienveillance » de la hiérarchie catholique à l’égard des personnes LGBTI et des femmes, pourquoi ne pas parler de l’opposition très organisée du Vatican à l’éducation à la sexualité à l’école fondée sur les études sur le genre, du financement depuis le milieu des années 90 de réflexions pour contrer les mouvements LGBTQI et féministes, du financement des réseaux anti-IVG (IVG que le pape compare aux crimes nazis) qui ont abouti au maintien d’un avortement clandestin et criminel notamment en Argentine, de l’approbation aux thérapies de conversion organisées par les églises (tentative à Bayonne), de la non-condamnation des prêches homophobes (messe homophobe du 15 juillet retransmise par France Culture, par exemple) etc ? Pourquoi ne pas dire, dans vos historiques, que le Catéchisme n’est toujours pas réformé, qu’on peut y lire que « les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés » (art. 2357) et que « les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté » (art. 2359) ?

– Vous affirmez que nous n’aurions pas vu la vidéo intégrale, que nous sommes sous le coup de l’émotion, qu’il s’agit d’une « fake news ». Nous serions donc, à vos yeux, incapables d’expertiser un sujet qui nous concerne directement, sur lequel nous nous penchons depuis des décennies, alors que l’on remarque une propension de votre part à produire des historiques lacunaires. Nous avons bien pris connaissance de l’intégralité des propos du pape et les avons bien compris.

– La réponse du pape est certes marquée par une rhétorique bienveillante de façade qui appelle au dialogue entre les parents et un enfant « aux tendances homosexuelles » et qui condamne l’exclusion de l’enfant. Or, cette bienveillance n’est en rien contradictoire avec la doctrine homophobe du catholicisme : aime le pêcheur, mais condamne le péché. En France, Christine Boutin s’est fait une spécialité de ce jésuitisme (« Les personnes homosexuelles, je les aime », tout en indiquant que l’homosexualité est une abomination). Cette hypocrisie et ce double discours dictent les conditions de cette « bienveillance », à commencer la chasteté. L’Église accepte les homosexuel-les si elles et ils ne sont pas homosexuel-les. Non, ce n’est pas de la bienveillance, c’est demander aux personnes homosexuelles de renoncer à ce qu’elles sont, de lutter contre leurs « penchants ».

– Dans toute son intervention, l’homosexualité est considérée comme un problème. Le premier conseil que donne le pape est de… prier. La prière est la base des « thérapies de conversion » qui reposent sur une lutte interne contre soi-même pour guérir de l’homosexualité. Le dialogue avec l’enfant est qualifié par le pape de « défi ». Un coming-out est assimilé du point de vue des parents à l’expression d’une « inquiétude de son fils ». Les parents aussi sont inquiet-es, et il faut les rassurer, d’où la mention de la psychiatrie (qui est une branche de la médecine visant à soigner des maladies mentales), mais jamais leur dire que l’homosexualité de leur enfant n’est pas un mal, ni un problème. Cette bienveillance n’est que le revers de la médaille d’une conception homophobe.

– Le pape maîtrise les mots. Le service de presse du Vatican a retiré le mot « psychiatrie » de la retranscription, révélant ainsi l’hypocrisie du pape. Quand il utilise ce terme « psychiatrie », il sait que l’homosexualité était considérée comme une maladie mentale à soigner pour l’OMS jusqu’en 1990, et que c’est encore le cas pour les personnes trans notamment en France à travers la psychiatrisation de la SOFECT. Il sait que cela a valu pour les homos et les trans des enfermements, des électrochocs, de la castration chimique de la part des psychiatres. Il sait que la psychiatrie imposée est une façon de discriminer, d’enfermer, de stigmatiser. Il sait que les personnes trans et intersexes ont encore à subir l’emprise de la psychiatrie forcée sur leur vie, notamment les enfants confrontés à « l’inquiétude » des parents. Pourquoi relativiser le poids d’un tel « mot » ?

 – La référence à la psychiatrie intervient alors que le pape se demande : « à quel âge se manifeste cette inquiétude (sic) de son fils ? » S’il est enfant, « il y a beaucoup de choses à faire par le biais de la psychiatrie pour voir comment sont les choses. C’est autre chose quand cela se manifeste après 20 ans ». Il n’est pas question de dialogue, il n’est pas question d’autres solutions que la psychiatrie pour les jeunes enfants aux tendances homosexuelles : à 20 ans, le problème est autre, selon le pape.

– Si nous avons parfois besoin de soutien psy (psychologue, psychanalyste, psychiatre), ce n’est pas parce que nous sommes homos, bis ou trans, et que notre identité serait un problème. C’est parce que nous sommes sans cesse confrontés à l’homophobie et la transphobie. En relativisant les propos du pape qui font de l’homosexualité un problème à prendre en charge psychiatriquement à l’enfance, vous niez les conséquences qu’ont les haines anti-LGBTI sur nos vies, qui se traduisent par exemple par un surtaux de suicide, notamment chez les adolescent-es. Ce surtaux de suicide, vous ne contribuez pas à le faire baisser en défendant l’indéfendable.

Et pour rappel, notre texte d’appel à rassemblement publié le 27/08/18 expliquant la nécessité d’une dénonciation commune :
Aucune résignation face aux offensives homophobes de la hiérarchie catholique !
Nous appelons à un rassemblement devant la Nonciature de Paris (ambassade du Vatican) pour protester contre les propos du pape François qui voue à la psychiatrisation les enfants perçu-es comme homosexuel-les.
Ce discours témoigne d’une volonté de stigmatiser et d’inférioriser les personnes lesbiennes, gaies, bies, trans, intersexes (LGBTI). L’homosexualité a été retirée de la liste des maladies mentales de l’OMS en 1990 seulement mais les « thérapies de conversion » sont toujours légales dans le monde, dont la France. Les personnes trans et intersexes continuent de subir l’emprise de la psychiatrie et à recevoir des injonctions à des « soins ». Le pape considère donc nos vies, nos identités, nos parcours comme des problèmes à soigner.
Nous ne sommes pas dupes. Cette proposition vise aussi à détourner l’attention des milliers d’actes de violences sexuelles perpétrés sur des enfants par les prêtres. Peinant à assumer ses responsabilités, le pape, accusé par un prêtre d’avoir ignoré un signalement de pédophilie, s’affiche avec Barbarin, soutien de la Manif pour tous et mis en examen pour avoir dissimulé des agressions. Au-delà de la psychiatrisation, se servir des personnes LGBT pour faire écran de fumée rajoute à l’indignité.
Cette nouvelle offensive homophobe intervient, en France, dans un contexte de tolérance généralisée à l’homophobie : France Culture a pu diffuser une messe ouvertement homophobe le 15 juillet dernier. Une nouvelle offensive se prépare pour cette rentrée contre l’éducation à la sexualité, la prévention du sexisme et des LGBT-phobies, et elle est organisée par les mêmes groupes religieux qu’en 2012. Emmanuel Macron, qui a nommé dans son gouvernement des sympathisants de la Manif pour tous, a salué le rôle des évêques dans l’accompagnement des «familles homosexuelles», malgré l’acharnement de la hiérarchie catholique contre nous. C’est à ces mêmes évêques que le report incessant de l’ouverture de la PMA semble donner raison. Comment attendre que la hiérarchie catholique nous respecte quand l’hésitation des politiques à garantir égalité et dignité envoie le signal que nous sommes des sous-citoyen-nes.

Nous devons manifester notre détermination à ne plus voir nos vies piétinées ainsi par le chef de l’Église catholique. Rassemblons-nous ce mardi 28 août à 18 h30 pour exiger une condamnation sans ambiguïté des propos du pape par Emmanuel Macron, et une politique tournant résolument le dos à l’homophobie du Vatican : ouverture de la PMA, changement d’état-civil pour les trans, éducation à la sexualité à l’école et à la lutte contre les stéréotypes de genre, etc.
Rassemblement autorisé par la préfecture. Métro Alma-Marceau. Rassemblement au croisement de l’avenue Wilson et de la rue Debrousse, au niveau du n°7 avenue Wilson.
Signataires : Collectif Irrécupérables, Acceptess Transgenres, AIDES, Act Up-Paris, Observatoire Des Transidentités, Le Castor Magazine, Les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence – Couvent des 69 Gaules, Association gays et lesbiennes en Libournais, Persesibi – Webzine Queer Indépendant, Diivineslgbtqi+, Turbulences Marne-la-Vallée, Alerta Feminista, Association Medusa, Libres d’être, Guarichas Cósmikas: batucada lesbo trans féministe, Act Up Sud-ouest, NRJKIR Paris 8, UNEF le syndicat étudiant, Les Soeurs de la Perpetuelle Indulgence – Couvent de Paname
https://www.facebook.com/events/256875291631488/